TW : Violences, genocide
Le mois d'avril est toujours particulier pour
les Rwandais.
Chaque année, ce mois est synonyme de deuil
et de commémorations.
Aujourd'hui, j'ai envie de parler de ce sujet
sous l’angle des médias car je pense qu’étudier le traitement médiatique du
génocide rwandais permet de mieux comprendre la déshumanisation des corps noirs
à l’échelle globale dans les médias.
Les premières images
Je ne me souviens pas à quel âge j'ai entendu parler du génocide pour la
première fois. J'avais un peu plus d'un an lorsque le génocide a commencé en
avril 1994. J'étais donc, beaucoup trop jeune pour comprendre ce qu’il se
passait et j'avais également la chance de ne pas vivre au Rwanda durant cette
période.
Ce dont je me souviens par contre, ce sont les premiers reportages que
j'ai vu sur le sujet.
J'entendais pour la première fois, à la télévision belge ou française
des gens qui parlaient ma langue et qui me ressemblaient. Et malheureusement,
j’ai entendu et vu les pires atrocités.
Je me souviens encore du regard de ces hommes et de ces femmes
s'agenouillant devant des journalistes et les suppliants pour être sauvés de
l'horreur. J’avais 8 ou 9 ans et j’étais sous le choc.
Les premières images de mon pays furent des images d'humiliation et de
tristesse.
Des images pour
sensibiliser?
Aujourd'hui encore, le gouvernement rwandais utilise les corps pour
sensibiliser
Il est devenu assez banal de tomber sur des photos d'os, de crânes
appartenant aux victimes du génocide. Et même si le but est de dénoncer la
tragédie, je trouve tout de même que l'utilisation de ce type d'images
extrêmement problématique.
Les journalistes de l'époque ont souhaité alerté l’opinion sur ce
conflit. Et même si avec le recul, j’estime qu’ils ont participé à une
déshumanisation des corps noirs, ce que je ne comprends pas, c’est l’intérêt de
rediffuser ces images aujourd’hui. Car les corps sont déshumanisés lorsque des
images et des scénarios brutaux sont montrés au grand public alors que ça
n’a aucun intérêt.
Derrière ces os, derrière ces corps, ce sont des individus avec leur
histoire, leur passé qui sont exposés. Aucun-e d'entre eux n'a choisi de se
retrouver là et aucun-e d'entre eux/elles n'a reçu une sépulture descente.
Je pense qu'après quasiment 24 ans, il est temps de leur accorder une
certaine pudeur.
La mort de Alan Kurdi
La mort de Alan Kurdi en 2015 a suscité énormément d’émoi. Alan est le
petit garçon syrien, retrouvé mort sur les plages de Turquie. Voir son
corps sans vie a dévasté énormément de gens.
Pourtant, l’émoi provoqué par sa photo m’a questionnée.
Pourquoi sa photo a provoqué plus d’empathie que les innombrables morts
en Méditerranée ?
La seule photo d’un enfant « blanc »[1] échoué
sur le sable vaut-elle plus que les milliers de morts annuels ?
Je pense que la force de cette photo se trouve dans le fait que ce genre
d’images soient rares. On
D’ailleurs, l’ONG ‘Save the Children’ a utilisé une jeune fille
britanique pour jouer une jeune syrienne. Grâce à ce procédé, la vidéo a fait
le buzz. https://www.youtube.com/watch?v=RBQ-IoHfimQ
Les médias ont toujours été utilisés comme miroir de la société. Ce
qu'on voit dans les médias, on a tendance à le reproduire et à le trouver
normal. Avec les images des corps noirs, on est entré dans un cercle vicieux
car nos écrans vont désensibiliser la société.
A force de voir de nombreux corps noirs, s'échouer et mourir dans la
méditerranée, on va estimer que c'est normal.
Les images peuvent provoquer de l'empathie, mais montrer continuellement
certains corps dans des scénarios horribles peut aussi renforcer l'idée que les
corps noirs ne méritent pas le même respect que les autres corps.
Ce qu’on peut faire
En tant que militant-e en ligne, nous sommes parfois les premiers à
partager du contenu choquant qui mettent les personnes noires dans des
positions dégradantes, dans l'espoir de sensibiliser. Mais très souvent, on
fait plus de mal que de bien en nourrissant des clichés.
Ce qu'on peut faire aussi, c'est dénoncer les médias et/ou les ONG qui
utilisent ces mêmes procédés.
N'oublions pas que nous sommes les seuls garants de notre dignité.
Source :
TECHNOLOGY AND THE DEHUMANIZATION OF THE BLACK BODY
*Dans cet article, je ne souhaite pas utiliser les termes de 'hutus' ou 'tutsis.
Ce n'est pas parce que je souhaite être colorblind mais c'est surtout pour éviter de provoquer des angoisses aux personnes concernées et ça rejoint la position que j'ai énoncée dans cet article.
**J'ai utilisé très peu de sources dans cet article mais j'aimerais en savoir plus sur ce sujet. N'hésitez pas à m'envoyer des ressources sur ce sujet.
TECHNOLOGY AND THE DEHUMANIZATION OF THE BLACK BODY
*Dans cet article, je ne souhaite pas utiliser les termes de 'hutus' ou 'tutsis.
Ce n'est pas parce que je souhaite être colorblind mais c'est surtout pour éviter de provoquer des angoisses aux personnes concernées et ça rejoint la position que j'ai énoncée dans cet article.
**J'ai utilisé très peu de sources dans cet article mais j'aimerais en savoir plus sur ce sujet. N'hésitez pas à m'envoyer des ressources sur ce sujet.
[1] Je sais qu’il n’est pas blanc
occidental, mais il est blanc de peau. Et beaucoup d’individus se sont enfin
dit, ‘il pourrait être mon fils. Il ressemble à mon fils.
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