lundi 1 août 2016

Touche pas à Matongé !

Jeudi 16 juin 2016, de nombreu.x.ses militant.e.s se sont réuni.e.s au Conseil Communal d’Ixelles afin de protester contre changement de nom du quartier Matongé.

Il y a quelques semaines, toute une série d’articles sortaient annonçant la fin du quartier Matongé au profit d’un nouveau nom : « Le Quartier des Continents ». Une pétition couplée à une invitation à un rassemblement à la commune d’Ixelles a été lancée. Mais la veille du rassemblement, on a assisté à un coup de théâtre. La bourgmestre a publié un communiqué de presse affirmant qu’aucun changement de nom n’était prévu et qu’il s’agissait tout simplement d’un malentendu. Mais puisque
le changement de nom n’était que le sommet de l’iceberg cachant la gentrification de tout le quartier, le rassemblement a été maintenu.
Ça fait bien longtemps que Matongé subit une pression immobilière dû à son emplacement. Entre l’Avenue Louise d’un côté et les institutions européennes de l’autre, difficile de garder intact un lieu aussi populaire et symbolique. Petit à petit, dans les rues avoisinantes de la Chaussée de Wavre, on a vu apparaître des cafés et des magasins plutôt bourgeois. D’ailleurs, ce sont ces commerçant.e.s qui sont à l’origine du projet de changement de nom. A la base, le Quartier des Continents est une ASBL regroupant plusieurs commerçants belges aux alentours de Matongé. Cette association fait du lobbying politique afin de transformer le quartier en un lieu plus chic et bourgeois. Le but final étant d’attirer une clientèle plus aisée qui pourrait avoir peur de la réputation sulfureuse des lieux.
Il est important de noter que le quartier Matongé est un « lieu-dit » et qu’en réalité, seule la STIB a inscrit ce nom à l’arrêt de bus et de métro correspondant.
Difficile pour ce quartier de survivre dans une ville qui ne saisit pas l’importance d’un tel endroit. La belle mobilisation de jeudi a prouvé que des milliers de concitoyens tiennent à ce quartier. Sa survie dans cet océan de capitalisme est vitale pour beaucoup de personnes. Dans une Belgique qui refuse de reconnaître son passé colonial, cette volonté de gommer ce quartier est une énième forme de néocolonialisme. C’est aussi une façon de dénier le droit des noirs à disposer de la place publique. Malgré tout, la mobilisation ne faiblit pas et le monde associatif et culturel africain ne lâchera pas l’affaire. D’ailleurs, le 30 juin prochain, une manifestation est organisée autour d’une hypothétique Place Lumumba. Alors qu’un peu partout dans le monde des rues Lumumba existent, en Belgique, son nom fait encore débat. C’est dire l’urgence dans laquelle on se trouve pour décoloniser la Belgique.
Plusieurs enjeux édifiants se cristallisent dans cette histoire de changement de nom et de gentrification. Le capitalisme, le néocolonialisme mais aussi et surtout, la difficulté qu’ont les gens de saisir à quel point tout est entremêlé.

Article publié une première fois sur le site des Jeunes anticapitalistes le 27 juin 2016.